Sabine Sicaud

Jeanine Moulin
La poésie féminine
Seghers, Paris (1963 ; tome 2, p. 293-294)


Sabine Sicaud, (1913-1928)

         Il était une fois une petite fille qui vivait près de Villeneuve-sur-Lot dans une demeure au nom prédestiné, « La Solitude ». Chaque jour, elle s’entretenait avec ses amis les merles en habit et les carpes vénérables, le vert platane et les vieux cyprès bourru, pénétrant leur âme secrète qu’elle évoquait ensuite dans ses vers. Car cette petite fille était un grand poète, unissant la fraîcheur d’imagination de l’adolescence à une précoce maturité.

         SABINE SICAUD n’avait que treize ans, en 1926, lorsque parurent à Poitiers, présentés par Anna de Noailles, ses Poèmes d’Enfant. Les fervents de la poésie y reconnurent immédiatement la marque du génie naissant.

         Peu après leur publication, Sabine Sicaud fut terrassée par une maladie torturante dont on ne parvint pas à la guérir. Elle mourut à l’âge de quinze ans, le 12 juillet 1928, laissant de nombreux inédits que François Millepierres a publiés en 1958 avec certains poèmes de l’édition de Poitiers. Comme celle-ci est presque introuvable, nous en extrayons quatre poèmes qui ne figurent pas dans le volume de 1958 (Le Premier Cyclamen, La Glycine, Fafou, Le Cinéma). Animée par des bruits d’ailes, de mouvants feuillages et de changeantes couleurs, la poésie de Sabine Sicaud découvre tout un monde animal et végétal où l’enfant s’évade avec bonheur, « un monde, précise François Millepierres, avec lequel elle se sent tout de suite unie par des liens de sympathie fraternelle, et dont elle tient à partager les joies et les peines ». Souvent aussi on la voit appareiller vers les lointains, vagabonde émerveillée qui rêve à partir des cartes, des livres et des cuirs précieux, à de miraculeux ailleurs où se retrouver plus allégrement soi-même. Sens précoce de la liberté qui n’a d’égal chez cette gosse de quatorze ans que celui de l’amour : « cet amour, écrit Henri Clouard, nous l’entendons prétendre qu’elle l’a à ses côtés. Elle voit son visage, ses yeux… Comme c’est mystérieux, ce sentiment chez Sabine, et qu’il est fort ! » Ainsi devina-t-elle des vérités tendres et amères que l’âge seul aurait dû lui révéler. Cette jeune Ève a-t-elle cueilli trop tôt les fruits trop lourds de la connaissance ? Le mal qui la tarauda ne fut jamais expliqué et ne lui laissa que de brefs répits pour exprimer sa détresse.

         Les pièces qui datent de l’époque de sa maladie sont les cris les plus poignants peut-être que la souffrance physique ait jamais arrachés à un poète. Certains disent la révolte, d’autres la patience, cette humble patience que les enfants, les bêtes et les plantes opposent à la douleur.

ŒUVRES : Poèmes d’Enfant, Préface de Madame la comtesse de Noailles, Poitiers, Les Cahiers de France, 1926. Les Poèmes de Sabine Sicaud, avant-propos de François Millepierres, Paris, Stock, 1958.

À consulter : FONTAINAS (André), Sabine Sicaud : Poèmes d'enfant, in Mercure de France, 1e nov. 1926 ; MIGUEL (André) : Morte de quinze ans, in Journal des Poètes, Bruxelles, mars 1959 ; CLOUARD (Henri) : Une œuvre unique, in Journal des Beaux-Arts, Bruxelles, 27 mars 1959.

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