Edvard Munch, L'enfant malade (huile sur toile, 1885-86)
Filliou…Je veux Filliou. Ne t’en va pas, Filliou.
Ferme la porte.
Sortir ? Pour aller où ?
Dis ? Je ne veux pas que tu sortes !
J’ai tout le temps besoin de toi. Pour tout,
Pour t’avoir là. Reste, Filliou…
Si tu t’en vas, je sonnerai si fort, si fort,
Que les murailles tomberont toutes ensemble.
Ma cloche vient de Chamonix. Elle ressemble
À celle qui chantait, l’été dernier, au bord
De ce vallon près de Ciboure. Tout le port
Y scintillait, tu te souviens? Tout le décor
S’assombrissait vers les montagnes et la cloche
Montait dans le chemin tout proche.
Au cou d’une petite vache rousse
Elle a chanté peut-être aussi
Ma clarine à moi, celle-ci…
Filliou, Filliou, c’est à grandes secousses
Qu’elle se fâche, tu sais bien,
Si tu descends ! Reviens…
Lis quelque chose, dis,
Quelque chose de gai…dis, tu n’as rien
De très comique, d’inédit ?
Alors, assieds-toi là…Raconte-moi, Filliou,
Raconte…
On ne l’avait jamais fini, ce conte
Qui nous passionnait ! Dis-le-moi jusqu’au bout…
C’est « Cœur de Nénuphar et Tige de Bambou »,
Tu te souviens ? Le soir, tu l’inventais pour nous
Et c’était merveilleux, si merveilleux, Filliou !
Raconte…